La porte du bureau s’ouvrit presque sans un bruit puis, tout aussi silencieusement, une petite fille se glissa dans l’entrebâillement. La pièce était bien éclairée et pourtant, elle avançait avec crainte. Elle imaginait le moment où on allait découvrir qu’elle était entrée dans cette pièce interdite. Elle se représentait, avec une imagination débordante, toutes les punitions qu’elle aurait à subir après sa mauvaise conduite car elle savait qu’elle finirait par être découverte. Elle l’était toujours. Personne ne pouvait lui cacher la vérité, ni elle, ni qui que ce soit d’autre. Elle fût tirée de ses pensées par une voix familière qui venait de l’extérieur.

« Hey Mëa, t’es là ? »

Elle se rapprocha de la fenêtre dont l’un des carreaux était cassé et se hissa sur la pointe des pieds pour voir ses amis en contrebas.

« Oui je suis là.
- Tu as trouvé le ballon ?
- Non pas encore.
- Grouille-toi, ils vont pas tarder à revenir. »

Poussée par une montée d’adrénaline, la petite fille se mit à quatre pattes en quête de l’objet ayant accidentellement pénétré dans la pièce quelques instants plus tôt. Elle se coupa avec un morceau de verre au sol, mais continua de chercher. Elle finit par apercevoir l’objet convoité. Ce dernier avait roulé jusqu’à derrière les pieds d’une grande armure au métal brillant installée dans un angle de la pièce.

« Tu l’as trouvé ?
- C’est bon je l’ai.
- Ben alors descend vite. »

La fillette regarda l’armure un moment. Elle se dressait face à elle telle une sentinelle silencieuse, une grande épée incurvée à la main. L’enfant se demanda ce que ses parents pouvaient bien faire d’une telle chose, puis elle s’avança lentement en tendant la main pour attraper la balle. À tout moment elle s’attendait à ce que l’armure s’anime et l’attrape, mais rien de tel ne se produisit.

Après avoir récupéré son ballon, elle commença à retrouver son calme et regarda plus attentivement la pièce qui l’entourait. Les armoires étaient remplies de livres et de parchemins, les étagères bourrées d’objets bizarres. Un grand bureau et quelques fauteuils venaient compléter le mobilier. Enfin, un immense tableau recouvrait presque l’intégralité d’un pan de la pièce. La scène qui y était peinte représentait un large groupe d’adultes qui semblaient tous très joyeux. La petite fille sursauta lorsqu’elle remarqua que l’un des personnages de la fresque n’était autre que sa mère revêtue de l’armure qui gardait les lieux. Il lui sembla aussi reconnaitre le chevalier Rablof qui venait parfois leur rendre visite, mais tous les autres visages lui étaient inconnus.

« Mëa, on est rentrée ma chérie. »

Au son de cette voix, un frisson de panique parcourra la jeune fille qui bondit hors de la salle.

« Maman, y’a le chat qui a fait une grosse bêtise ! »